Presse Reviews 2005 à 2007

2007

LE MONDE 25/8/2007

ROCHEFORT ENVOYÉ SPÉCIAL Sylvain Siclier

Samedi 25 août, vers 18 h 45. Tony Truant, ancien des Dogs et membre des Wampas, donne concert dans la rue, à Rochefort. Il s'élance de la petite scène et monte sur une table bistrot pour faire chanter le public, radieux. Et aussi vite, il revient sur scène pour rendre honneur à I Shall Be Released,
de Bob Dylan chanté avec Sylvain Vanot et Vic Moan.

Dimanche 26 août, pique-nique sur les pelouses de la Corderie royale. Le contrebassiste britannique George Wolfheart se met à la mandoline. Un jour précédent, les guitaristes et chanteur Barry Melton (Etats-Unis) et Johan Asherton (France) se découvraient dans un jardin caché de la ville. Tout cela décidé quelques heures ou minutes plus tôt, après une discussion dans une chambre d'hôtel, en répétition chez l'habitant, au hasard d'une rencontre au festival Rochefort en accords, organisé pour sa 3e édition du 23 au 25 août.

Philippe Thieyre, créateur du festival en 2005, a inventé avec le programmateur Karel Beer une manifestation qui a trouvé un esprit. A savoir, la surprise, la rencontre de musiciens, l'improvisation contrôlée, l'idée, sans obligation, de faire pratiquer la reprise. Chacun mêle ses compositions à des standards archi-connus du rock ou du blues, mais aussi des titres obscurs connus de trois pelés et un tondu. Tout est permis. Parce qu'il y a ici un grand sérieux musicien, on est le plus souvent hors du cliché du machin bricolé au débotté.

Cet esprit se prolonge en soirée, sur la grande scène du festival. Les concerts de Rochefort ne sont pas de ceux qui se répéteront le lendemain dans une autre ville. On peut bousculer son répertoire,
faire intervenir d'un signe un musicien resté en coulisses.

QUELQUES HÉROS HABITUÉS

Prenons la Britannique Angie Palmer . Samedi soir, elle débute avec (Talkin'About) A Revolution, de Tracy Chapman, pour "votre nouveau président de la République". Puis se recale sur ses récentes compositions, dont le joliment entraînant Michelangelo. Et bam, All Along The Watchtower, de Dylan, presque parlé, avec le guitariste BJ Cole qui allume les étoiles. Une version à tomber.

Question musique, la base est folk-rock avec apport blues et country, une touche de psyché.
Un fonds britannique et américain qu'il faudrait quelques centaines de vies à un amateur
un peu éclairé pour connaître de bout en bout.

Les gars et les filles qui viennent ici maîtrisent l'histoire. Ils sont âgés de 20 à 60 ans.
Certains sont leaders, d'autres accompagnateurs réguliers de vedettes.
Des carrières au long cours par des artistes dont les noms s'échangent comme
des secrets qu'on a aussitôt envie de dévoiler.

Le festival a déjà quelques héros habitués. Comme le contrebassiste californien John Lester -
sa ballade I Saw You est un tube à Rochefort -, les guitaristes et chanteurs Panama Red, Barry Melton BJ Cole qui joue avec tout le monde, Nick Harper dont Rochefort Calling,
clin d'oeil au London Calling des Clash est devenu un hymne.

John Greaves est l'une des plus belles voix de la musique britannique.
Un phrasé qui se met en déséquilibre avec le rythme des chansons. Il vient du rock progressif des années 1970. Bassiste, chanteur, pianiste, il passe de la caresse vocale au presque cri sur des balades superbes.
Seul au piano, il chante un poème de Dylan Thomas puis un de Paul Verlaine.

Le pianiste Geraint Watkins le rejoint pour un blues qui vire au free. Une chanson pop pour finir, Rose c'est la vie. Le public est un peu hésitant, puis se laisse séduire. Le folk-rock est loin, mais la musique est au plus près. Ici, c'est ce qui importe.


Rochefort en Accords
Impromptu et imprévisible
le festival fête sa troisième édition.

Cela sera assurément un des temps forts du festival. Le concert inaugural de Michel Deneuve, aujourd’hui à 17 h 30 sur le pont transbordeur, marque le coup d’envoi du festival de rock & folk. Le pont transbordeur, c’est un nouveau lieu choisi cette année pour donner certains concerts. Construit à la Belle Époque, il fait partie des dix-huit survivants au monde. En fait, une nacelle traverse la Charente. En huit minutes de traversée, aller-retour, les artistes joueront en acoustique, tout en mouvement. Un voyage exceptionnel pour le public, qui apprécie l’atmosphère toute particulière de l’évènement. Comme dans tous les lieux de Rochefort, d’ailleurs. Choisie au XVIIe siècle par Louis XIV pour abriter l’arsenal naval du royaume, la ville, malgré ses formes géométriques, regorge d’endroits intimistes, de jardins cachés. De quoi donner de nombreux concerts dans des lieux impromptus. Impromptu, c’est le mot qui revient souvent pour qualifier cet évènement qui, en trois éditions, s’est déjà taillé une belle réputation. Avec leurs concerts inattendus durant l’après-midi, pour lesquels la programmation est tenue secrète, il est vrai que les organisateurs réservent déjà quelques surprises.

L’idée, selon Philippe Thieyre, un des initiateurs du festival, est « d’inciter les spectateurs à faire l’effort de découvrir ». La programmation est d’ailleurs bâtie sur un répertoire surtout anglo-américain, « des gens qu’on ne voit pas suffisamment en France », note Philippe Thieyre. Ce sont ainsi de grands musiciens comme Geraint Watkins, accompagnateur de Paul McCartney, qui sont invités. Pas des têtes d’affiche, mais des virtuoses qui aiment se retrouver, jouer ensemble des morceaux inédits, de l’un ou de l’autre. Autre temps fort du festival jeudi, avec John Greaves qui chantera Verlaine au Temple.

Sylvain Mouillard l'Humanité 22/8/2007

2006

LIBERATION

Il n'aura donc fallu que deux éditions à Rochefort en accords pour démantibuler définitivement le traditionnel concept festivalier. Le postulat est simple pourtant, résumé par Philippe Thieyre ( Rock & Folk, France
Inter), organisateur de la fête avec Karel Beer (l'homme de la Java) :«Inviter des musiciens issus d'horizons divers (folk, blues, rock...) qui ne se connaissent pas, sinon de réputation, à se rencontrer autour de
répertoires qui ne sont pas forcément les leurs.»
Phénomène. Une initiative séduisante, mais quelque peu risquée. D'autant que, si les musiciens présents ne se connaissent pas, que dire alors de l'ignorance d'un public convié à assister aux (quatre à six) spectacles
gratuits de l'après-midi dont il sait seulement qu'ils sont soit «imprévisibles» soit «inattendus». Personne n'a en effet la moindre idée de qui va se produire parmi la vingtaine de noms figurant sur l'affiche.
Pourtant chaque concert affiche complet. Chacun apprenant à se familiariser à sa façon avec les invités : «l'harmoniciste à musette» (Sal Bernardi), «le gugusse à la mandoline» (Paul Tiernan, sideman de Donovan), «le grand bassiste qu'on voit tout le temps» (le Californien John Lester), etc.
Mais le phénomène le plus étonnant est que les intervenants adorent ce système. «En quarante ans de carrière, je n'avais encore jamais vu ça, affirme ainsi Barry Melton, c'est génial, ça me fait penser à un trajet en
bus durant lequel on parlerait à tous les voyageurs.» L'ancien guitariste de Country Joe & The Fish saura d'ailleurs se montrer particulièrement disert, croisant le manche chaque soir avec tout ce qui se présente et improvisant même un formidable raout urbain (au coin de l'avenue Lafayette et de la rue
Lesson) comme à la grande époque du flower power de San Francisco. Combien de badauds sauront alors que ce petit bonhomme rondouillard, aux boucles blanchies sous la casquette, réactualisant le Superbird qui fustigeait jadis Lyndon B. Johnson en pamphlet anti-Bush, fut le meilleur guitariste de rock psychédélique et l'inventeur du célèbre «ooooh ohoho ooooh-oh» woodstockien repris depuis à la fin de chaque concert ? «Woodstock, ça n'était pas si formidable qu'on le prétend, démystifiera-t-il plus tard, Monterey était un bien meilleur festival.
Et Rochefort aussi est mieux.» Serrer des pinces. Rochefort, le festival atypique qui renverse les valeurs.
Où l'on croise Michael Zwerin, l'unique tromboniste à avoir joué avec Miles Davis, Eric Dolphy et Téléphone, muni de son seul stylo de journaliste, et les rock critics Philippe Barbot et Olivier Nuc venus avec leurs guitares
(ils se produiront avec Johan Asherton puis Arman Méliès, fils spirituel de Murat et de H.G. Wells) ; où Ségolène Royal, en brève visite électorale et attentive à serrer un maximum de pinces, se fera claquer la bise par
l'Australien bourru Chris Kenna ; où B.J. Cole, flanqué de la violoncelliste Emily Burridge, interprétera Debussy et Satie à la pedal steel guitar ; où Keith Christmas, le plus fin médiator du folk anglais (c'est lui qui tient
les parties de guitare sur le Space Oddity de Bowie) renouera avec une carrière musicale prématurément interrompue ; où Peter Rowan et ses invités reprendront No Woman No Cry de Bob Marley ; où Steve James & Del Rey (les nouveaux Lulu Belle & Scotty) convertiront country le Nadine de Chuck Berry ;
où Robyn Hitchcock, l'ex-échalas dandy des Soft Boys, rendra hommage aux Beatles, à Arthur Lee et à son idole Syd Barrett. «L'esprit est là, se félicite-t-on donc du côté de l'organisation. Tous les participants sont
rémunérés de la même façon, et, si le budget reste modeste [65 000 euros, ndlr], le lieu, lui, reste magique.
Et sur le plan strictement artistique c'est une totale réussite.»

Serge Loupien Libération Mardi 29/08/2006
http://www.liberation.fr/culture/musique/200923.FR.php


LE MONDE
Rochefort revisite et actualise le folk-rock


C'est un festival unique en France, en Europe et pourquoi pas au monde, celui de Rochefort en accords,
dont la deuxième édition (24-26 août) affiche une trentaine de musiciens.
Première idée : mettre en avant le folk-rock, son histoire et son présent, dans son rapport avec le blues comme dans ses échappées psychédéliques. Le folk-rock ? Ce truc étiqueté ringard... raté : il a ici, passant par de jeunes musiciens radieux et rageurs, ou des anciens aux doigts agiles et aux textes vifs (et vice versa),
un sens du présent musical qui vaut toutes les modernités autoproclamées.

Deuxième idée : demander aux musiciens de jouer, en plus de leurs compositions, celles d'autres artistes, superstars ou méconnus, titres universels ou oubliés. Les Anglo-Saxons, peu préoccupés par l'ego de
l'auteur-compositeur-interprète, pratiquent la reprise depuis la nuit des temps du blues, de la country ou du rock. Avec allégresse et respect. Troisième idée : proposer aux musiciens de s'écouter les uns et les autres,
de se trouver des envies de travailler ensemble. Truc casse-gueule avec ambiance feu de camp. Pas ici. La proposition est prise avec sérieux. Le tout donne un "festival inattendu et imprévisible" porté par des lieux de
taille humaine. Un jardin secret en arrière du théâtre, accessible par un corridor, le temple protestant et ses bancs en arc de cercle, ou encore un bel espace à la Corderie royale, fermé d'un côté par un rempart, ouvert de
l'autre sur la Charente. Le public est curieux, veut découvrir. Les 24 et 25 août, une sorte d'inventaire reflète tous les possibles du festival. Le contrebassiste et chanteur américain John Lester, outre sa
prestation en duo avec l'Irlandais Paul Tiernan (guitare, mandoline et chant) - ils se sont rencontrés lors de l'édition 2005 - joue avec tout le monde ou presque. Nick Harper, fils de Roy Harper, référence du folk
britannique, passe d'une de ses compositions à frémir à une reprise acoustique, secouante,
de Whole Lotta Love de Led Zeppelin.

DÉPAYSEMENT SONORE
Philippe Barbot et Olivier Nuc, journalistes très musiciens, font revivre de manière convaincante la poésie du Sud de Nino Ferrer, avant de convier Johan Asherton sur Hey Hey, My My, de Neil Young. Lequel Asherton met sa voix pleine, son élégance guitaristique au service d'une chanson de Tim Hardin.
Steve James et Del Rey, le premier venu d'Austin, la seconde de Seattle, jouent l'infini répertoire du blues sur leurs guitares de métal. Entrain, dépaysement sonore. Peter Rowan emballe tout le monde sur une version
country de No Woman, No Cry de Bob Marley. De la pedal steel guitar sur du reggae, ce ne peut-être qu'à Rochefort. Avec un maître de l'instrument, BJ Cole. Et, pour montrer que le folk rock a les oreilles ouvertes,
la prestation de Marc Minelli avec ordinateur est du meilleur effet, par sa grâce et son expressivité.
Tard dans la nuit, Barry Melton, ancien de Country Joe and the Fish (l'une des sensations de Woodstock), réhabilite la notion de l'improvisation psyché avec un orchestre où tout le monde prend son solo en même temps. Dans le contexte, le moment est plaisant.

Sylvain Siclier
Article paru dans l'édition du 27.08.06
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0,36-806651,0.html


2005

Rencontres insolites entre quelques pointures rock, folk ou blues, sur la
scène de la première édition du festival Rochefort en accords.
"Rochefort comme un boeuf"

Par Serge LOUPIEN lundi 29 août 2005 Liberation

C'est le festival le plus original de l'été. Le plus pointu aussi. Une invraisemblable concentration charentaise de musiciens familiers aux habitués du Who's Who de la rock music. Nick Lowe, Van Morrison, Willy DeVille, Marianne Faithfull, Beck, REM, The Stranglers, Mark Knopfler, James «Blood» Ulmer, Paul McCartney,
Joe Strummer... tous ont été par le passé employeurs, ou partenaires, de l'un des noms inscrits à l'affiche
d'une manifestation qui se revendique elle-même «imprévisible et inattendue».
Horizons divers. «Imprévisible, explique Philippe Thieyre, libraire-disquaire parisien (Parallèles),
collaborateur de Rock & Folk et France Inter, et coanimateur de la fête, parce qu'à n'importe
quel moment n'importe quel musicien peut en inviter un autre à monter sur scène.»
En jazz, on appelle ça : faire le boeuf. Mais si l'expression demeure et fait même partie de la mythologie
du genre, à de rares exceptions près, elle n'est plus guère d'actualité, tant il est vivement
conseillé désormais de swinguer carré.
D'où la singularité du concept imaginé par les organisateurs du festival
(Thieyre, donc, et Karel Beer, programmateur pointilleux de l'Hôtel du Nord) : inviter des musiciens issus d'horizons divers (folk, blues, rock...) à se rencontrer autour de répertoires qui ne sont pas forcément les leurs.
«L'idée, dit Philippe Thieyre, était de pousser les uns et les autres à jouer avec des gens qu'ils ne connaissaient pas, sinon de réputation. Pour cela, au lieu de passer le temps d'un concert, nous les avons conviés à rester trois ou quatre jours, à manger au même endroit, afin de favoriser les rencontres.
Beaucoup d'initiatives sont nées pendant les repas.
Après un quart d'heure de répétition, ils étaient prêts à monter sur scène.
C'est dans ces moments-là qu'on mesure la qualité des musiciens présents. Dès qu'ils jouent ensemble, ils parviennent à s'accorder très très vite. Justifiant l'intitulé du festival : Rochefort en accords.»
Ainsi, durant trois jours, un pourcentage non négligeable de Rochefortais éclairés aura-t-il assisté à quelques «rencontres» insolites, telles celle du Français Johan Asherton et de l'Irlandais Paul Tiernan,
ex-guitariste de Donovan ; celle de ce même Tiernan et du contrebassiste californien John Lester ;
celle du nouveau trio de Hugh Cornwell, du pianiste jazzy gallois Geraint Watkins et du spécialiste anglais de la pedal steel guitar B.J. Cole ; celle de Panama Red, ancien comparse de l'ingérable Texan Kinky Friedman,
et du New-Yorkais Sal Bernardi, guitariste de Ricky Lee Jones...
Avec, en point d'orgue, l'arrivée impromptue de Jacques Higelin, embarquant d'emblée David Thomas
(ex-chanteur king size de Pere Ubu) et Rodolphe Burger (ex-Kat Onoma) sur son vol sécurisé
New York-Paris, Paris-New York.
«C'est là encore une illustration du côté imprévisible du festival, remarque Philippe Thieyre.
Si Higelin vient gracieusement sans être annoncé, on peut penser qu'à l'avenir un Mark Knopfler est capable de débarquer juste pour le plaisir ou qu'un mec comme Cabrel peut être tenté de se frotter à Geraint
Watkins, qui a joué avec McCartney. Tous les musiciens programmés sont exceptionnels et beaucoup
de gens ont envie de jouer avec eux.»
Concerts gratuits. Le fait que la ville natale de l'extravagant Pierre Loti créateur de Ramuntcho,
le contrebandier bondissant d'Ascain, dont la maison (qui se visite sur réservation) semble avoir été décorée
par un Christian Lacroix sous ecstasy serve de cadre à un festival aussi atypique
(«Tous les participants sont rémunérés de la même façon», souligne Philippe Thieyre)
peut être aussi considéré comme un signe quant à l'avenir de celui-ci.
La ville semble résolue à continuer de s'impliquer, la région et le département aussi.
«L'esprit est là, note-t-on du côté de l'organisation. Si le budget reste modeste, le lieu est magique
et la réussite totale sur le plan artistique.» A preuve, le succès des concerts gratuits de l'après-midi,
qui ont fait globalement le plein. A Rochefort, l'imprévisibilité festivalière parait donc partie pour durer.
Et prendre des formes toujours plus inattendues. «Il existe ici un studio d'enregistrement,
affirme ainsi Philippe Thieyre. Il serait peut-être possible de se brancher dessus.
Après avoir rodé quelques morceaux ensemble, les musiciens auront peut-être
envie de les enregistrer. Qui sait..."


"Bonheurs harmoniques"
Philippe Barbot Télérama

Retour sur la première édition de Rochefort en accords, un festival folk-rock-blues
qui privilégiait les rencontres entre artistes.

A Rochefort, c’est unique en France, les voitures pilent pour laisser traverser les piétons. A Rochefort, cité autrefois militaire et marine, les rues sont aussi rectilignes qu’à Manhattan. A Rochefort, on peut visiter l’extraordinaire maison de Pierre Loti, écrivain bourlingueur, fêtard et néanmoins académicien.
A Rochefort, on reconstruit à l’identique l’Hermione, le vaisseau qui transporta La Fayette jusqu’en Amérique.A Rochefort, Jacques Demy tourna jadis un film sur les demoiselles du même nom.
A Rochefort, existe désormais le festival musical le plus aventureux et inattendu de l’hexagone.
Ca s’appelle « Rochefort en accords », et ça rime à peu près. Trois soirées entièrement dédiées au folk, blues, rock et swing, imaginées par deux étrangers amoureux du genre, l’anglais Karel Beer et le parisien Philippe Thieyre. Un peu dans l’esprit des « hootenanies » d’antan, ces fiestas champêtres au goût d’embruns salés et de pineau des Charentes, réunissaient, le week-end dernier une tribu de musiciens de tous pays, tous poils et toutes cordes. Un principe de base : jouer les chansons des autres et si possible, les uns avec les autres. On a pu assister ainsi à des boeufs mémorables et quasi historiques : essayez d’imaginer sur la même scène, Rodolphe Burger, ex-leader du groupe strasbourgeois Kat Onoma, David Thomas, ténor des trublions yankees de Pere Ubu, et Jacques Higelin, fou, fan et fils spirituel de Charles Trenet, entonnant en choeur le Passenger d’Iggy Pop ou le Paris New York dudit Higelin... De sa retraite du désert de Mojave, Captain Beefheart a du en sursauter d’émotion. Autre moment (Roche)fort, B. J. Cole, specialiste anglais de la pedal steel guitar, réclamé entre beaucoup d’autres par Björk, Beck ou REM, accompagnant Hugh Cornwell,
ex-chanteur des Stranglers : always the sun...
Les concerts étaient répartis à travers la ville, entre deux scènes gratuites sises dans un coquet jardin et un seyant préau d’école, et un espace payant au pied du site de la Corderie (monument historique, tout en longueur, là où on fabriquait jadis les cordes... de bateau). Entre autres bonheurs harmoniques, on y vit le français Silvain Vanot ourdir une épique reprise du Cortez the Killer de Neil Young, le bilingue Johan Asherton s’attaquer au Don’t think twice de Dylan, ou le flamboyant americain Panama Red démontrer que le boogie-woogie avait encore de beaux jours devant lui. Autres révélations, le mandoliniste Vic Moan, américain de Paris, sorte de Tiny Tim do-wop, René Miller, lutin swing éternellement coiffé d’un feutre cabossé, ou Sal Bernardini, multi-instrumentiste travaillant avec Rickie Lee Jones et Willy deVille, et aussi expert dans l’art de souffler dans un harmonica que dans celui de téter une canette de bière. Impossible de les citer tous, ces dingos du folk-rock, mais honneur à la seule dame du lot, Clare Muldaur-Manchon, sorte de Joni Mitchell avec la pêche de Bette Midler.
Bref, une réussite conviviale et musicale, que cette première édition d’un festival qui batifole courageusement hors des sentiers rebattus, sans têtes d’affiches marketing ni fonctionnaires des tournées marathons. Un souffle d’air pur qu’on a envie de respirer à nouveau : rendez-vous l’année prochaine avec les damoiseaux de Rochefort.


Du 25 au 27 août derniers se déroulait dans la ville de Rochefort (que tout le monde connait bien sûr pour ses fameuses Demoiselles !) la première édition du festival Rochefort en Accords, décrit par le journal Libération comme «le plus original et le plus pointu de l'été».
Le principe est simple : faire se rencontrer le temps de quelques morceaux et bœufs improvisés des musiciens au talent incontestable mais malheureusement au nom trop peu connu du grand public.
Ainsi on a pu assister pendant deux jours à des rencontres exceptionnelles et magiques entre des musiciens comme le guitariste Irlandais Paul Tiernan (ancien musicien de Donovan) et l'excellent contre-bassiste Américain John Lester ou le français Johan Asherton, ou encore le Gallois Geraint Watkins, notamment compère de Paul McCartney, Van Morrison et Mark Knopfler, et le rockeur Américain Panama Red.
Suite à quelques changements de dernière minute, d'autres musiciens se sont rajoutés à cette belle affiche comme Jeb Loy Nichols en duo avec l'incontournable BJ Cole, grand spécialiste Anglais de la pedal steel guitar et qui participe régulièrement à l'enregistrement des albums de quelques grands noms du rock tels que Beck, Björk, REM et Marianne Faithfull. Enfin, et cerise sur le gâteau, Hugh Cornwell des mythiques Stranglers, est venu en trio à la fois pour nous présenter quelques uns de ses nouveaux morceaux mais également pour nous faire le bonheur de jouer quelques classiques des Etrangleurs tels que Peaches, (Get a) Grip (On Yourself)
ou encore Walk On By ! Un vrai régal !
On peut dire que pour sa première édition, Rochefort en Accords n'aura pas fait les choses à moitié.
Ainsi le week-end aura également été marqué par la présence de Jacques Higelin venu en invité surprise
taper le bœuf avec ses acolytes Rodolphe Burger (Kat Onoma) et David Thomas (ex chanteur de Pere Ubu). Un grand moment d'anthologie notamment lorsque les 3 musiciens ont repris The Passenger d'Iggy Pop
pour une version des plus intense et surprenante !
On peut donc dire que les spectateurs ont été sacrément gâtés pendant ce dernier week-end du mois d'août, une jolie façon de finir les vacances. Car si la fréquentation du festival a été un peu en dessous des prévisions, nul doute que tous ceux qui étaient présents sont repartis conquis... et difficile d'en être autrement lorsqu'on voit des musiciens de cette qualité prendre autant de plaisir à jouer ensemble et être capable d'improviser à n'importe quel moment et sur n'importe quelle chanson. Ainsi, le moment le plus intense restera sans doute le final du dernier soir durant lequel tous les musiciens présents (c'est à dire une bonne vingtaine !) ont investi la scène pour un jam endiablé de 10 minutes devant un public aux anges ! Une belle façon de clôturer la première édition d'un festival qui se dit lui-même « imprévisible et inattendu ». Vivement l'année prochaine pour la seconde édition ! *

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